Le sommet Climate Chance des 7-8 mars à Nantes a fait réagir aux conséquences de la guerre d'Ukraine et proposer un APPEL DE NANTES : (texte ici, EN ici)

Il donne lieu aussi à une bonne couverture radio par la radio européenne EuRadio

L'atelier du 7 mars a donné lieu à un enregistrement vidéo que l'on peut écouter ICI (ou même télécharger mais 400Mo)


L’invasion de l’Ukraine par les troupes de Vladimir Poutine a révélé deux faiblesses potentiellement mortelles de l’Union Européenne : la dépendance de notre mode de vie à l’énergie fossile, qui nous soumet aux exigences du pouvoir russe ; la dépendance de notre sécurité, qui nous fait dépendre du bon vouloir et des intérêts de notre protecteur américain.


Nous appelons les autorités européennes et les États membres à aller au-delà des mesures d’urgence actuelles pour en tirer les conséquences structurelles qui s’imposent.


Notre mode de vie et la difficulté à engager réellement la transition vers des sociétés durables nous a conduit à bafouer nos valeurs pour nous concilier les producteurs de pétrole et à renoncer à nos principes pour ne pas couper le robinet du gaz russe. Les objectifs à moyen terme que nous nous sommes fixés depuis trente ans se sont avérés inefficaces. L’incapacité à penser globalement notre empreinte écologique nous a conduit à externaliser les productions coûteuses en énergie et à accroître nos dépendances à l’égard de pays qui ne partagent pas nos valeurs. Les États membres n’ont pas su assumer le caractère systémique de la transition, additionnant des politiques sectorielles incapables de transformer en profondeur notre modèle économique et social et l’idée que nous nous faisons de la prospérité.


La crainte des États membres de perdre une parcelle supplémentaire de leur souveraineté en mutualisant les moyens de défense, les divergences éventuelles sur la nature des périls auxquels se préparer, la facilité de s’en remettre aux États Unis pour assurer notre défense nous ont endormis pendant des décennies, depuis le rejet par la France de la Communauté européenne de défense en 1954. Le réveil est brutal, la guerre à nos portes révélant notre propre impuissance à nous défendre ou à aider l’Ukraine à faire face à l’agresseur.


La convergence de ces deux impuissances nous invite à revisiter d’urgence la gouvernance de l’Union européenne en la fondant sur les principes de la gouvernance à multi-niveaux, déjà reconnus officiellement par l’Union comme le moyen de concilier unité et diversité. Ils sont une réponse adaptée à ces deux faiblesses en renforçant l’unité européenne tout en préservant la diversité des situations, histoires et cultures des peuples qui la composent et sont sa richesse. L’application de ces principes doit conduire :


- à définir, pour la lutte contre le réchauffement climatique, un objectif annuel commun de résultat, faisant passer l’empreinte écologique totale de chaque État membre, où que les émissions se produisent, de sa valeur actuelle, variable d’un État membre à l’autre, à 2t d’équivalent CO2 d’ici 2050. Ce qui revient à plafonner les émissions et à abaisser ce plafond d’un pourcentage constant pendant 28 ans, le pourcentage dépendant pour chaque État membre de la situation de départ. Chaque État membre et, au sein de cet État, chaque région et territoire est invité à élaborer une stratégie permettant d’atteindre ce résultat ;


- à créer, pour la défense, un commandement intégré, des normes communes relatives au poids des dépenses militaires dans les budgets nationaux et à l’interopérabilité des armements, combinés avec un partage des tâches entre les États membres pour le développement de nouveaux armements, les unités combattantes nationales gardant, au sein de ce commandement intégré, leur langue et leur culture militaire.


Tout cela suppose de renforcer le sentiment de communauté de destin d’un peuple européen uni par des valeurs et un destin communs :

- par la mise en œuvre d’un processus instituant partant des régions et amenant les citoyens à dialoguer sur l’avenir de l’Europe ;

- par la mise en place d’un service civique européen, dédié à des activités militaires de défense ou à des activités civiles de conduite de la transition. Ce sont les territoires qui, dans le cadre d’un protocole fixé au niveau européen , seront les mieux à même d’accueillir les services civils.


Nous appelons, au nom de la survie de l’Europe face aux deux urgences du dérèglement climatique et de la guerre à nos frontières, l’Union européenne à se transformer en une Fédération 2.0, capable à la fois d’une unité de vue et d’une large décentralisation des initiatives : une fédération 2.0 fondée non sur une distribution des compétences entre les différents niveaux de gouvernance mais sur des modalités précises de coopération entre des différents niveaux, enrichies année après année par l’expérience.

(Texte proposé par Pierre Calame et soutenu par Armel Prieur, Robert Jestin...